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#144 – Wagner : quel jeu joue Evgueni Prigogine ?

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En plateau

Régis Genté, journaliste, correspondant dans l’ancien espace soviétique pour RFI, France 24 et Le Figaro, est installé depuis plus de vingt ans à Tbilissi, capitale de la Géorgie. Un an après (ou presque) l’invasion de l’Ukraine par la Russie de Poutine, le 24 février 2022, il questionne le rôle de la milice Wagner dans les combats se déroulant dans le Donbass ainsi que les ambitions prêtées à son fondateur Evgueni Prigojine.

Contexte

La prise de Soledar, le 11 janvier 2023, est la première victoire russe depuis la contre-offensive ukrainienne de l’été dans la région du Donbass. Si l’importance stratégique de la ville conquise est toute relative, la question de savoir à qui revient le mérite de cette victoire l’est moins. A en croire du moins la mini guerre de l’information qu’elle a entraînée, le groupe Wagner et le ministère de la Défense russe s’en attribuant chacun la paternité exclusive ou partielle. Outre la photo d’Evgueni Prigogine posant au fond de la mine de sel ayant donné son nom à la ville, et le drapeau à tête de mort de la milice Wagner dont il est le fondateur, flottant sur Soledar, en lieu et place du drapeau tricolore russe, on retiendra de la séquence historique la nomination le lendemain, le 12 janvier 2023, par Vladimir Poutine du général Valeri Guerassimov, déjà chef d’état-major des armées, au poste de commandant militaire en Ukraine.

De toute évidence, constate Régis Genté, Evgueni Prigogine n’engrange apparemment pas les bénéfices escomptés de sa victoire à Soledar, avec la promotion de son rival Valeri Guerassimov dont le pouvoir sort renforcé par le cumul de ses deux fonctions. Vladimir Poutine a-t-il voulu réaffirmer la primauté de l’armée, instrument de la puissance de l’Etat russe, face à l’inconstitutionnalité du groupe paramilitaire Wagner dont l’existence n’a jamais été légalisée ? Le dirigeant russe joue-t-il son atout maître en renforçant les pouvoirs et l’autorité de Valeri Guerassimov, face à Evgueni Prigogine d’une part et Ramzan Kadyrov (le président tchétchène dont les milices « kadyrovtsy » combattent aussi en Ukraine et qui multiplie les appels à la guerre totale) d’autre part ? Les ambitions de ces deux chefs de guerre pratiquant la surenchère sont-elles perçues comme une menace échappant à tout contrôle ? Que dit cette séquence historique de ce qui se passe dans les arcanes du pouvoir à Moscou ? Que dit-elle du fonctionnement du système de Poutine ?

Retour sur le parcours d’Evgueni Prigogine. Né en 1961, à Saint-Pétersbourg (alors Leningrad), il est un ancien « zek », prisonnier russe : il fut condamné en 1979 à douze ans de prison pour « brigandage, escroquerie et incitation de mineurs à la prostitution ». Il est libéré en 1990, à la chute de l’Union soviétique, et fait fortune dans la restauration. Il est réputé proche de Poutine, une des rares personnalités à approcher le chef du Kremlin. Leur amitié ou proximité remonterait à l’époque où le fondateur du groupe paramilitaire Wagner, avait ouvert un restaurant de luxe à Saint-Pétersbourg où Poutine avait ses habitudes et continuait d’emmener ses hôtes officiels quand il devint président de la Fédération de Russie. D’où son surnom de « cuisinier de Poutine ». Aujourd’hui, il ferait peur à une partie des élites et des cercles dirigeants russes dont il fait partie. Pourquoi ?

Est-ce en raison de sa férocité ? Evgueni Progogine a en effet recruté pour ses milices, dans les prisons russes, 40 000 hommes envoyés contractuellement combattre pour six mois en Ukraine en échange de leur libération, au terme du contrat. Plusieurs centaines de ces nouvelles recrues ont été sacrifiées sur les lignes ukrainiennes, lors de la prise de Soledar. Celui qui tentait d’échapper à la mort, s’enfuyait, refusait de monter à l’assaut, était abattu par les cadres de Wagner placés en seconde ligne.

Est-ce le chef de guerre qui fait peur ou bien les ambitions politiques qu’on lui prête à tort ou à raison ? Faut-il prendre à la lettre les déclarations d’Evgueni Prigogine ? L’homme n’a pas que des amis à Moscou. Quelle est la part de bluff et vantardise dans son comportement ? Afin de continuer à bénéficier de l’oreille de Poutine, mais aussi de l’accès aux ressources financières qu’il permet, faut-il coûte que coûte faire parler de soi ? Evgueni Prigogine est-il ou non en perte de vitesse ? Poutine peut-il se séparer maintenant de celui qui, depuis 2010, est volontiers l’homme des basses œuvres de son régime ? A la tête d’une armée privée portant le nom du musicien préféré de Hitler, patron d’un groupe médiatique Patriot et de ses fermes à trolls, Progogine a envoyé ses milices combattre en Ukraine dès 2014, puis en Syrie ; il aurait fait irruption dans la présidentielle américaine de 2016 pour empêcher la victoire d’Hilary Clinton ; il soutient les forces hostiles à la France en Afrique, il assure la sécurité de dirigeants africains en échange d’accords économiques et d’accès aux ressources minières. Une contribution notable qui interroge. Poutine peut-il vraiment lâcher Progogine ? Veut-il seulement apaiser les tensions avec l’armée russe en recadrant Prigogine et procéder à un nouvel rééquilibrage des forces militaires en Ukraine ?

À l’oreille

Pour aller plus loin

  • Régis Genté, « La guerre totale est déclarée » in Paris-Match, édition du 19 au 25 janvier 2023
  • Régis Genté, « Cercles dirigeants russes : infaillible loyauté au système Poutine ?», Russie. NEI. Reports, n°38, IFRI, juillet 2022
  • Régis Genté et Stéphane Siohan, Volodymyr Zelinsky. Dans la tête d’un héros, éditions Robert Laffont, 2022.
  • Régis Genté, Poutine et le Caucase, Buchet-Chastel, 2014

ET

  • Radio Cause commune, Le monde en questions, n°122, n°124 et n°138
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Contexte

La prise de Soledar, le 11 janvier 2023, est la première victoire russe depuis la contre-offensive ukrainienne de l’été dans la région du Donbass. Si l’importance stratégique de la ville conquise est toute relative, la question de savoir à qui revient le mérite de cette victoire l’est moins. A en croire du moins la mini guerre de l’information qu’elle a entraînée, le groupe Wagner et le ministère de la Défense russe s’en attribuant chacun la paternité exclusive ou partielle. Outre la photo d’Evgueni Prigogine posant au fond de la mine de sel ayant donné son nom à la ville, et le drapeau à tête de mort de la milice Wagner dont il est le fondateur, flottant sur Soledar, en lieu et place du drapeau tricolore russe, on retiendra de la séquence historique la nomination le lendemain, le 12 janvier 2023, par Vladimir Poutine du général Valeri Guerassimov, déjà chef d’état-major des armées, au poste de commandant militaire en Ukraine.

De toute évidence, constate Régis Genté, Evgueni Prigogine n’engrange apparemment pas les bénéfices escomptés de sa victoire à Soledar, avec la promotion de son rival Valeri Guerassimov dont le pouvoir sort renforcé par le cumul de ses deux fonctions. Vladimir Poutine a-t-il voulu réaffirmer la primauté de l’armée, instrument de la puissance de l’Etat russe, face à l’inconstitutionnalité du groupe paramilitaire Wagner dont l’existence n’a jamais été légalisée ? Le dirigeant russe joue-t-il son atout maître en renforçant les pouvoirs et l’autorité de Valeri Guerassimov, face à Evgueni Prigogine d’une part et Ramzan Kadyrov (le président tchétchène dont les milices « kadyrovtsy » combattent aussi en Ukraine et qui multiplie les appels à la guerre totale) d’autre part ? Les ambitions de ces deux chefs de guerre pratiquant la surenchère sont-elles perçues comme une menace échappant à tout contrôle ? Que dit cette séquence historique de ce qui se passe dans les arcanes du pouvoir à Moscou ? Que dit-elle du fonctionnement du système de Poutine ?

Retour sur le parcours d’Evgueni Prigogine. Né en 1961, à Saint-Pétersbourg (alors Leningrad), il est un ancien « zek », prisonnier russe : il fut condamné en 1979 à douze ans de prison pour « brigandage, escroquerie et incitation de mineurs à la prostitution ». Il est libéré en 1990, à la chute de l’Union soviétique, et fait fortune dans la restauration. Il est réputé proche de Poutine, une des rares personnalités à approcher le chef du Kremlin. Leur amitié ou proximité remonterait à l’époque où le fondateur du groupe paramilitaire Wagner, avait ouvert un restaurant de luxe à Saint-Pétersbourg où Poutine avait ses habitudes et continuait d’emmener ses hôtes officiels quand il devint président de la Fédération de Russie. D’où son surnom de « cuisinier de Poutine ». Aujourd’hui, il ferait peur à une partie des élites et des cercles dirigeants russes dont il fait partie. Pourquoi ?

Est-ce en raison de sa férocité ? Evgueni Progogine a en effet recruté pour ses milices, dans les prisons russes, 40 000 hommes envoyés contractuellement combattre pour six mois en Ukraine en échange de leur libération, au terme du contrat. Plusieurs centaines de ces nouvelles recrues ont été sacrifiées sur les lignes ukrainiennes, lors de la prise de Soledar. Celui qui tentait d’échapper à la mort, s’enfuyait, refusait de monter à l’assaut, était abattu par les cadres de Wagner placés en seconde ligne.

Est-ce le chef de guerre qui fait peur ou bien les ambitions politiques qu’on lui prête à tort ou à raison ? Faut-il prendre à la lettre les déclarations d’Evgueni Prigogine ? L’homme n’a pas que des amis à Moscou. Quelle est la part de bluff et vantardise dans son comportement ? Afin de continuer à bénéficier de l’oreille de Poutine, mais aussi de l’accès aux ressources financières qu’il permet, faut-il coûte que coûte faire parler de soi ? Evgueni Prigogine est-il ou non en perte de vitesse ? Poutine peut-il se séparer maintenant de celui qui, depuis 2010, est volontiers l’homme des basses œuvres de son régime ? A la tête d’une armée privée portant le nom du musicien préféré de Hitler, patron d’un groupe médiatique Patriot et de ses fermes à trolls, Progogine a envoyé ses milices combattre en Ukraine dès 2014, puis en Syrie ; il aurait fait irruption dans la présidentielle américaine de 2016 pour empêcher la victoire d’Hilary Clinton ; il soutient les forces hostiles à la France en Afrique, il assure la sécurité de dirigeants africains en échange d’accords économiques et d’accès aux ressources minières. Une contribution notable qui interroge. Poutine peut-il vraiment lâcher Progogine ? Veut-il seulement apaiser les tensions avec l’armée russe en recadrant Prigogine et procéder à un nouvel rééquilibrage des forces militaires en Ukraine ?

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