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Leslie Voltaire, président du CPT d'Haïti: «On espère des élections générales vers la mi-novembre»
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Leslie Voltaire, président du Conseil présidentiel de transition haïtien, est l'invité de RFI et France 24. Au micro de Marc Perelman et Arnaud Pontus, il évoque la crise sécuritaire et humanitaire en Haïti. Il précise aussi le calendrier électoral 2025 et révèle avoir parlé avec le président français de « la dette d'indépendance ».
Marc Perelman : Monsieur le président, je vais commencer par la situation sécuritaire. On estime que 85 % du territoire de la capitale Port-au-Prince est actuellement aux mains des gangs. Il y a eu plusieurs massacres de grande ampleur ces derniers mois qui ont frappé l'opinion. Le secrétaire général de l'ONU, Antonio Guterres, dans son dernier rapport sur Haïti, avertit : « les gangs pourraient s'emparer de l'ensemble de la zone métropolitaine de Port-au-Prince, ce qui entraînerait l'effondrement complet de l'autorité de l'État ». Il a raison ?
Je ne pense pas qu'il ait raison. Je sais que la police et l'armée, aidées par la Force multinationale de support à la sécurité à la police haïtienne, est en train de combattre les gangs non seulement dans la zone métropolitaine, surtout dans les hauteurs à Kenscoff et aussi dans l'Artibonite. Je pense qu'avec l'annonce du secrétaire d'État (américain), Marco Rubio, qui dit qu'ils vont continuer à financer la force multinationale, on a eu un apport de 200 Kényans en plus, de 80 Salvadoriens et de 150 Guatémaltèques. La police va refouler les gangs et on va arriver à les isoler. On nous avait promis 2500 troupes. Nous sommes en train de former des militaires et des policiers. On a un apport en matériel létal des États-Unis et de la France. Je pense que les gangs sont en train de reculer sur certains fronts. Ils attaquent sur d'autres fronts. Mais je pense qu'on va avoir une sécurité beaucoup plus prononcée dans la zone métropolitaine.
Arnaud Pontus : Monsieur le président, vous parlez de cette Mission Internationale d'Appui à la Sécurité. Vous le dites, 800 hommes sur 2500 espérés, cela fait tout de même une très grande différence. Et pour l'heure, au risque de vous contredire, les gangs ne reculent pas…
Les gangs ont reculé sur Delmas 2. Les gangs reculent dans l'Artibonite. Ils attaquent sur d'autres fronts. Et en plus, non seulement on a 8000 policiers, on a 1200 soldats et maintenant, la force multinationale va augmenter.
Et ces effectifs vous semblent nécessaires ? Suffisants en l’état ?
Ils ne sont pas suffisants. Je pense qu'on est en train de faire du lobby pour augmenter les effectifs et la population s'est alliée à la police et ils ont commencé à faire des travaux de légitime défense sur les bandits. Et c'est une guerre qu'on a lancée et on a lancé un slogan de pacification du pays durant l'année 2025.
C'est ce que vous avez dit il y a quelques jours. Et vous pensez cet objectif tenable ?
C'est totalement tenable.
Marc Perelman : Je veux quand même en venir à la situation humanitaire qui est dramatique. Un million de déplacés en 2024, trois fois plus que l'année précédente. Deux millions d'Haïtiens en situation d'insécurité alimentaire grave. L’ONU a lancé un appel de fonds pour 900 millions de dollars, mais on sait que les précédents appels n'ont pas été concluants. Est-ce que vous espérez de la communauté internationale, vous avez vu le pape à Rome, le président français ici à Paris, qu'elle va enfin se tenir réellement aux côtés des Haïtiens ?
Je crois que le secrétaire d'État américain avait annoncé que le président Trump allait couper l'aide humanitaire. Mais hier, j'ai vu qu'ils se sont ravisés. Ils ne vont pas couper l'aide humanitaire. Le Programme alimentaire mondial est en train de fournir des aliments et des médicaments à l'Organisation internationale de la migration et l'Organisation nationale de la migration en Haïti. C'est une situation compliquée et difficile, mais je crois qu'on va arriver à un retour au quartier en éliminant les gangs qui contrôlent certains quartiers.
Parlons de la situation et des perspectives politiques en Haïti. Vous avez promis la tenue d'un référendum sur la Constitution, ainsi que des élections générales, à l'horizon d'un an à peu près. Le secrétaire général de l'ONU, Antonio Guterres, parle d'objectifs compromis. Pensez-vous vraiment pouvoir tenir ce calendrier ?
Je pense que oui. On peut tenir ce calendrier. On espère que vers la fin avril, vers la mi-mai, on aura un référendum sur la Constitution. Et à partir de ce référendum, qui dira quelle sorte de conseil électoral on aura dans la nouvelle Constitution, qu'on pourra commencer avec les joutes électorales. On espère que les élections se feront vers la mi-novembre et le deuxième tour vers la mi-janvier pour qu'enfin le 7 février on ait un gouvernement légitime. Moi je pense qu'on aura des élections dans huit départements qui sont libres de gang. On aura des élections dans l'Artibonite, qui est à un quart contrôlé par les gangs. On aura des élections de la moitié de Port-au-Prince. Les gens qui vivent dans les zones contrôlées par les gangs pourront aller s'inscrire dans les zones qui sont libres et voter dans les zones qui sont libres. Mais je dois dire aussi que la dernière élection, le président Jovenel Moïse avait réussi avec 500 000 électeurs. Maintenant, on a à peu près sept millions d'électeurs. Si les élections se font avec cinq millions d'électeurs, le gouvernement légitime, le président ou la présidente, les sénateurs, les députés ou les maires seront beaucoup plus légitimes que le conseil présidentiel que je préside.
D’un mot sur cette question, ça veut dire que tous les Haïtiens ne pourront peut-être pas voter, tous ceux qui le veulent, et qu'on ne pourra pas voter partout. Ça, c'est un état de fait que vous admettez d'ores et déjà ?
J'admets d'ores et déjà, et j'admets aussi que on va essayer de faire voter les Haïtiens qui se trouvent en diaspora pour augmenter le taux de participation. Et j'admets aussi que ce sera beaucoup plus légitime qu'un conseil présidentiel qui est issu d'un accord politique. C'est une légitimité sociale et politique, mais ce n'est pas une légitimité électorale.
Pour refermer cet entretien, vous avez rencontré ce mercredi le président français Emmanuel Macron. Est-ce que vous lui avez parlé de la restitution de la dette d'indépendance ? Pour ceux qui nous écoutent, en un mot : 1825 la France du roi Charles X avait exigé d'Haïti des indemnités au moment de l'indépendance. Est-ce que vous avez demandé à votre homologue le remboursement ?
Ce n'est pas moi qui ai demandé, c'est lui qui a commencé à parler de la restitution…
Et qui vous l'a proposé ?
Et de la réparation. Et il a dit que le 17 avril, qui marquera le bicentenaire de cette rançon, il va faire une déclaration.
Et vous pensez que ce sera une déclaration dans le sens d'une restitution ? On parle de 525 millions d'euros…
On n'a pas parlé d'argent, on a parlé de principes, d'une déclaration et qu'on va voir ensemble.
Donc les relations sont bonnes aujourd'hui avec le président français ?
Elles sont très bonnes et très cordiales.
Vous avez oublié les mots lâchés en novembre dernier, qui s'adressaient aux membres du Conseil présidentiel de transition ?
On n'en a pas parlé et je pense que ce n'était pas de bon ton d'en parler.
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Leslie Voltaire, président du Conseil présidentiel de transition haïtien, est l'invité de RFI et France 24. Au micro de Marc Perelman et Arnaud Pontus, il évoque la crise sécuritaire et humanitaire en Haïti. Il précise aussi le calendrier électoral 2025 et révèle avoir parlé avec le président français de « la dette d'indépendance ».
Marc Perelman : Monsieur le président, je vais commencer par la situation sécuritaire. On estime que 85 % du territoire de la capitale Port-au-Prince est actuellement aux mains des gangs. Il y a eu plusieurs massacres de grande ampleur ces derniers mois qui ont frappé l'opinion. Le secrétaire général de l'ONU, Antonio Guterres, dans son dernier rapport sur Haïti, avertit : « les gangs pourraient s'emparer de l'ensemble de la zone métropolitaine de Port-au-Prince, ce qui entraînerait l'effondrement complet de l'autorité de l'État ». Il a raison ?
Je ne pense pas qu'il ait raison. Je sais que la police et l'armée, aidées par la Force multinationale de support à la sécurité à la police haïtienne, est en train de combattre les gangs non seulement dans la zone métropolitaine, surtout dans les hauteurs à Kenscoff et aussi dans l'Artibonite. Je pense qu'avec l'annonce du secrétaire d'État (américain), Marco Rubio, qui dit qu'ils vont continuer à financer la force multinationale, on a eu un apport de 200 Kényans en plus, de 80 Salvadoriens et de 150 Guatémaltèques. La police va refouler les gangs et on va arriver à les isoler. On nous avait promis 2500 troupes. Nous sommes en train de former des militaires et des policiers. On a un apport en matériel létal des États-Unis et de la France. Je pense que les gangs sont en train de reculer sur certains fronts. Ils attaquent sur d'autres fronts. Mais je pense qu'on va avoir une sécurité beaucoup plus prononcée dans la zone métropolitaine.
Arnaud Pontus : Monsieur le président, vous parlez de cette Mission Internationale d'Appui à la Sécurité. Vous le dites, 800 hommes sur 2500 espérés, cela fait tout de même une très grande différence. Et pour l'heure, au risque de vous contredire, les gangs ne reculent pas…
Les gangs ont reculé sur Delmas 2. Les gangs reculent dans l'Artibonite. Ils attaquent sur d'autres fronts. Et en plus, non seulement on a 8000 policiers, on a 1200 soldats et maintenant, la force multinationale va augmenter.
Et ces effectifs vous semblent nécessaires ? Suffisants en l’état ?
Ils ne sont pas suffisants. Je pense qu'on est en train de faire du lobby pour augmenter les effectifs et la population s'est alliée à la police et ils ont commencé à faire des travaux de légitime défense sur les bandits. Et c'est une guerre qu'on a lancée et on a lancé un slogan de pacification du pays durant l'année 2025.
C'est ce que vous avez dit il y a quelques jours. Et vous pensez cet objectif tenable ?
C'est totalement tenable.
Marc Perelman : Je veux quand même en venir à la situation humanitaire qui est dramatique. Un million de déplacés en 2024, trois fois plus que l'année précédente. Deux millions d'Haïtiens en situation d'insécurité alimentaire grave. L’ONU a lancé un appel de fonds pour 900 millions de dollars, mais on sait que les précédents appels n'ont pas été concluants. Est-ce que vous espérez de la communauté internationale, vous avez vu le pape à Rome, le président français ici à Paris, qu'elle va enfin se tenir réellement aux côtés des Haïtiens ?
Je crois que le secrétaire d'État américain avait annoncé que le président Trump allait couper l'aide humanitaire. Mais hier, j'ai vu qu'ils se sont ravisés. Ils ne vont pas couper l'aide humanitaire. Le Programme alimentaire mondial est en train de fournir des aliments et des médicaments à l'Organisation internationale de la migration et l'Organisation nationale de la migration en Haïti. C'est une situation compliquée et difficile, mais je crois qu'on va arriver à un retour au quartier en éliminant les gangs qui contrôlent certains quartiers.
Parlons de la situation et des perspectives politiques en Haïti. Vous avez promis la tenue d'un référendum sur la Constitution, ainsi que des élections générales, à l'horizon d'un an à peu près. Le secrétaire général de l'ONU, Antonio Guterres, parle d'objectifs compromis. Pensez-vous vraiment pouvoir tenir ce calendrier ?
Je pense que oui. On peut tenir ce calendrier. On espère que vers la fin avril, vers la mi-mai, on aura un référendum sur la Constitution. Et à partir de ce référendum, qui dira quelle sorte de conseil électoral on aura dans la nouvelle Constitution, qu'on pourra commencer avec les joutes électorales. On espère que les élections se feront vers la mi-novembre et le deuxième tour vers la mi-janvier pour qu'enfin le 7 février on ait un gouvernement légitime. Moi je pense qu'on aura des élections dans huit départements qui sont libres de gang. On aura des élections dans l'Artibonite, qui est à un quart contrôlé par les gangs. On aura des élections de la moitié de Port-au-Prince. Les gens qui vivent dans les zones contrôlées par les gangs pourront aller s'inscrire dans les zones qui sont libres et voter dans les zones qui sont libres. Mais je dois dire aussi que la dernière élection, le président Jovenel Moïse avait réussi avec 500 000 électeurs. Maintenant, on a à peu près sept millions d'électeurs. Si les élections se font avec cinq millions d'électeurs, le gouvernement légitime, le président ou la présidente, les sénateurs, les députés ou les maires seront beaucoup plus légitimes que le conseil présidentiel que je préside.
D’un mot sur cette question, ça veut dire que tous les Haïtiens ne pourront peut-être pas voter, tous ceux qui le veulent, et qu'on ne pourra pas voter partout. Ça, c'est un état de fait que vous admettez d'ores et déjà ?
J'admets d'ores et déjà, et j'admets aussi que on va essayer de faire voter les Haïtiens qui se trouvent en diaspora pour augmenter le taux de participation. Et j'admets aussi que ce sera beaucoup plus légitime qu'un conseil présidentiel qui est issu d'un accord politique. C'est une légitimité sociale et politique, mais ce n'est pas une légitimité électorale.
Pour refermer cet entretien, vous avez rencontré ce mercredi le président français Emmanuel Macron. Est-ce que vous lui avez parlé de la restitution de la dette d'indépendance ? Pour ceux qui nous écoutent, en un mot : 1825 la France du roi Charles X avait exigé d'Haïti des indemnités au moment de l'indépendance. Est-ce que vous avez demandé à votre homologue le remboursement ?
Ce n'est pas moi qui ai demandé, c'est lui qui a commencé à parler de la restitution…
Et qui vous l'a proposé ?
Et de la réparation. Et il a dit que le 17 avril, qui marquera le bicentenaire de cette rançon, il va faire une déclaration.
Et vous pensez que ce sera une déclaration dans le sens d'une restitution ? On parle de 525 millions d'euros…
On n'a pas parlé d'argent, on a parlé de principes, d'une déclaration et qu'on va voir ensemble.
Donc les relations sont bonnes aujourd'hui avec le président français ?
Elles sont très bonnes et très cordiales.
Vous avez oublié les mots lâchés en novembre dernier, qui s'adressaient aux membres du Conseil présidentiel de transition ?
On n'en a pas parlé et je pense que ce n'était pas de bon ton d'en parler.
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