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Kaja Kallas, la «dame de fer» de l’Estonie à la tête de la diplomatie européenne
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C’est elle qui a été choisie pour incarner la diplomatie européenne : Kaja Kallas doit succéder à l’espagnol Josep Borrell pour devenir la Haute représentante de l’Union européenne. Agée de 47 ans, l’ancienne avocate dirige l’Estonie depuis 2021 mais elle s’est fait connaitre sur la scène internationale à partir de février 2022, avec l’invasion de l’Ukraine par la Russie.
Dans les semaines qui suivent le déclenchement du conflit, Kaja Kallas acquiert une stature et une renommée qui vont bien au-delà de la place démographique et économique de l’Estonie. En consacrant 30 % du budget de la défense de son pays à l’aide militaire à l’Ukraine – aucun pays européen n’en fait autant, et en défendant à chaque occasion une ligne très claire : il faut soutenir l’Ukraine coûte que coûte et ne rien céder à la Russie. « Elle s'est montrée très courageuse en mettant l'accent sur les choses importantes », pointe Margaret Seselgyte, directrice de l’Institut de relations internationales de l’Université de Vilnius. « Elle a parlé de l'aide à l'Ukraine mais aussi du gel des avoirs russes malgré l'absence de consensus à ce sujet. Elle a donc fait preuve de créativité et d'une position très ferme en ce qui concerne la guerre en Ukraine. »
À lire aussiL'Estonienne Kaja Kallas, résolument anti-Poutine, à la tête de la diplomatie européenne
Une position très ferme qui s’explique par la situation géographique de l’Estonie, coincée entre la mer Baltique et la Russie, mais aussi par l’histoire familiale de Kaja Kallas. Aujourd’hui âgée de 47 ans, la dirigeante estonienne est née sous l’URSS mais n’a que des souvenirs d’enfance de cette époque. En revanche, son arrière-grand-père a participé à la première indépendance du pays en 1920. Et, après la Seconde guerre mondiale, plusieurs membres de sa famille sont déportés par le pouvoir soviétique – ce que Kaja Kallas ne cesse de rappeler lorsqu’elle parle de « l’occupation russe » de son pays. « Ma mère, déportée en Sibérie alors qu’elle était bébé, a souffert des crimes de guerre que la Russie a infligés à beaucoup trop de gens. En théorie, on parlait de paix, mais il s’agissait d’une paix selon les termes russes, c’est-à-dire des atrocités de masse, des répressions, de la colonisation. »
Dans les pas de son père
Sa mère et sa grand-mère vont revenir de déportation au bout de dix ans. Et sa famille va de nouveau marquer l’histoire politique de l’Estonie : son père devient Premier ministre après la fin de l’URSS, puis commissaire européen durant une dizaine d’années. Kaja Kallas fait d’abord une carrière d’avocate, mais marche vite dans les pas de son père en devenant députée européenne pour le Parti de la Réforme, le parti libéral fondé par Siim Kallas en 1994. Elle devient Première ministre en 2021 et se fait donc très vite remarquer à l’international pour sa pugnacité…
Paradoxalement, tandis que sa renommée ne cesse de croître sur la scène européenne, son étoile commence à pâlir en Estonie. Notamment en raison de difficultés économiques mais aussi d’un scandale retentissant lié à son mari. « Son mari avait des relations d’affaires avec la Russie, ce qui a suscité une controverse très grave, rappelle Margaret Seselgyte de l’Université de Vilnius. « D’un côté elle critiquait tous ces pays qui refusaient de sanctionner Moscou, et de l’autre elle n’était pas totalement transparente sur les affaires de son mari. Elle a prétendu qu’elle n’était pas au courant mais cela n’a pas suffi et il y a eu un très grand scandale politique en Estonie mais aussi dans toute la région balte car ici les gens sont très sensibles à tout ce qui touche à la Russie. »
Une victoire pour les pays de l’Est
Mais ces difficultés n’entament en rien son crédit sur la scène européenne – et son nom s’impose tout naturellement pour succéder à Josep Borrel. Kaja Kallas convoite un temps le poste de secrétaire général de l'Otan, mais renonce pour laisser la place au Néerlandais Mark Rutte, et se concentre alors sur le poste de Haut représentant de l'UE. À son expérience diplomatique et politique, à son incontestable expertise sur le dossier ukrainien, s’ajoutent des qualités personnelles : Kaja Kallas parle non seulement le russe et l’estonien, mais elle est à l’aise également en français et en anglais. Seule interrogation : sera-t-elle capable de s’occuper d’autres dossiers que celui de l’Ukraine ? « La politique étrangère de l'Union européenne va au-delà de l'Ukraine et des sanctions contre la Russie », relève Nicole Gnesotto, vice-présidente de l’Institut Jacques Delors. « Et donc, effectivement, certains peuvent se demander si, vis à vis de la Méditerranée, du Maghreb, ou des crises en Afrique, elle aura autant de dynamisme pour porter la politique étrangère de l'Union européenne. »
À lire aussiEstonie: la Première ministre dans la tourmente après la révélation des liens entre son mari et la Russie
Le défi est d’autant plus délicat à relever que la diplomatie européenne est loin d’être univoque, en particulier sur la question du Proche-Orient et du conflit à Gaza. En témoignent les difficultés qu’aura rencontrées sur ce sujet Joseph Borell, depuis l’attaque terroriste du 7 octobre 2023. Une certitude : la nomination de Kaja Kallas à ce poste prestigieux, l’un des « top jobs » de l’Union européenne, constitue un signal très fort envoyé aux pays baltes et aux anciens pays du glacis soviétique… « Je pense que c’est un grand succès pour l’Estonie mais aussi pour tous les pays de la région », se félicite Margaret Seselgyte. « Cela signifie que l’UE n’a plus peur de tenir compte de ce que nous disons depuis des années de la Russie, alors que nous avons longtemps été critiqués pour notre soi-disant paranoïa… Le fait que Kaja Kallas soit nommée, c’est une forme de justice qui nous est rendue ! Et symboliquement et émotionnellement, c’est pour nous une grande victoire. »
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C’est elle qui a été choisie pour incarner la diplomatie européenne : Kaja Kallas doit succéder à l’espagnol Josep Borrell pour devenir la Haute représentante de l’Union européenne. Agée de 47 ans, l’ancienne avocate dirige l’Estonie depuis 2021 mais elle s’est fait connaitre sur la scène internationale à partir de février 2022, avec l’invasion de l’Ukraine par la Russie.
Dans les semaines qui suivent le déclenchement du conflit, Kaja Kallas acquiert une stature et une renommée qui vont bien au-delà de la place démographique et économique de l’Estonie. En consacrant 30 % du budget de la défense de son pays à l’aide militaire à l’Ukraine – aucun pays européen n’en fait autant, et en défendant à chaque occasion une ligne très claire : il faut soutenir l’Ukraine coûte que coûte et ne rien céder à la Russie. « Elle s'est montrée très courageuse en mettant l'accent sur les choses importantes », pointe Margaret Seselgyte, directrice de l’Institut de relations internationales de l’Université de Vilnius. « Elle a parlé de l'aide à l'Ukraine mais aussi du gel des avoirs russes malgré l'absence de consensus à ce sujet. Elle a donc fait preuve de créativité et d'une position très ferme en ce qui concerne la guerre en Ukraine. »
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Une position très ferme qui s’explique par la situation géographique de l’Estonie, coincée entre la mer Baltique et la Russie, mais aussi par l’histoire familiale de Kaja Kallas. Aujourd’hui âgée de 47 ans, la dirigeante estonienne est née sous l’URSS mais n’a que des souvenirs d’enfance de cette époque. En revanche, son arrière-grand-père a participé à la première indépendance du pays en 1920. Et, après la Seconde guerre mondiale, plusieurs membres de sa famille sont déportés par le pouvoir soviétique – ce que Kaja Kallas ne cesse de rappeler lorsqu’elle parle de « l’occupation russe » de son pays. « Ma mère, déportée en Sibérie alors qu’elle était bébé, a souffert des crimes de guerre que la Russie a infligés à beaucoup trop de gens. En théorie, on parlait de paix, mais il s’agissait d’une paix selon les termes russes, c’est-à-dire des atrocités de masse, des répressions, de la colonisation. »
Dans les pas de son père
Sa mère et sa grand-mère vont revenir de déportation au bout de dix ans. Et sa famille va de nouveau marquer l’histoire politique de l’Estonie : son père devient Premier ministre après la fin de l’URSS, puis commissaire européen durant une dizaine d’années. Kaja Kallas fait d’abord une carrière d’avocate, mais marche vite dans les pas de son père en devenant députée européenne pour le Parti de la Réforme, le parti libéral fondé par Siim Kallas en 1994. Elle devient Première ministre en 2021 et se fait donc très vite remarquer à l’international pour sa pugnacité…
Paradoxalement, tandis que sa renommée ne cesse de croître sur la scène européenne, son étoile commence à pâlir en Estonie. Notamment en raison de difficultés économiques mais aussi d’un scandale retentissant lié à son mari. « Son mari avait des relations d’affaires avec la Russie, ce qui a suscité une controverse très grave, rappelle Margaret Seselgyte de l’Université de Vilnius. « D’un côté elle critiquait tous ces pays qui refusaient de sanctionner Moscou, et de l’autre elle n’était pas totalement transparente sur les affaires de son mari. Elle a prétendu qu’elle n’était pas au courant mais cela n’a pas suffi et il y a eu un très grand scandale politique en Estonie mais aussi dans toute la région balte car ici les gens sont très sensibles à tout ce qui touche à la Russie. »
Une victoire pour les pays de l’Est
Mais ces difficultés n’entament en rien son crédit sur la scène européenne – et son nom s’impose tout naturellement pour succéder à Josep Borrel. Kaja Kallas convoite un temps le poste de secrétaire général de l'Otan, mais renonce pour laisser la place au Néerlandais Mark Rutte, et se concentre alors sur le poste de Haut représentant de l'UE. À son expérience diplomatique et politique, à son incontestable expertise sur le dossier ukrainien, s’ajoutent des qualités personnelles : Kaja Kallas parle non seulement le russe et l’estonien, mais elle est à l’aise également en français et en anglais. Seule interrogation : sera-t-elle capable de s’occuper d’autres dossiers que celui de l’Ukraine ? « La politique étrangère de l'Union européenne va au-delà de l'Ukraine et des sanctions contre la Russie », relève Nicole Gnesotto, vice-présidente de l’Institut Jacques Delors. « Et donc, effectivement, certains peuvent se demander si, vis à vis de la Méditerranée, du Maghreb, ou des crises en Afrique, elle aura autant de dynamisme pour porter la politique étrangère de l'Union européenne. »
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