Thaïlande: attentats à la bombe et attaques meurtrières dans le Sud insurrectionnel
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Près de la frontière avec la Malaisie, dans l’extrême sud de la Thaïlande, où une insurrection armée dure depuis plus de 20 ans, les habitants font face à un nouveau pic de violence. Le week-end dernier, des attentats et des fusillades ont fait au moins six morts et une quinzaine de blessés. Éclairages.
Avec notre correspondant à Bangkok, Valentin Cebron
Samedi soir, une dizaine d’insurgés ont lancé des explosifs et ouvert le feu sur la mairie de Sungai Kolok, une ville du sud de la Thaïlande, dans la province de Narathiwat, à la frontière avec la Malaisie. Deux gardes qui surveillaient les lieux sont morts et une dizaine de civils ont été blessés.
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Plus tard dans la nuit, à Pattani, une autre province dans le Sud, des assaillants ont tué trois paramilitaires.
Et le lendemain, dans la province de Yala, des hommes armés ont abattu un agent de sécurité d’un village.
« Les gens ici sont effrayés, nous raconteBee, un commerçant de Sungai Kolok, ils ont peur de sortir n’importe où. En ce moment, à 6 heures du soir, tout le monde rentre chez soi. Il y a énormément de militaires, de policiers. C’est calme, très calme ».
Cette série d’attaques meurtrières rappelle ainsi que le sud de la Thaïlande est en proie à un conflit dont on ne parle peu. Ce conflit oppose le gouvernement thaïlandais et un groupe armé séparatiste d’ethnie malaise et de religion musulmane. Les provinces de Narathiwat, Yala et Pattani, les plus au sud du pays, sont soumises à une loi martiale depuis plus de 20 ans. L’armée et les points de contrôle sont omniprésents.
Pour des raisons historiques et culturelles, les Malais musulmans du Sud de la Thaïlande, pays qui compte plus de 90 % de bouddhistes, sont les habitants les moins bien intégrés à l'ensemble national.
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En 2004, le massacre de Tak Bai, lorsque 78 Malais musulmans sont morts asphyxiés à l’arrière de fourgons militaires, a ravivé une insurrection séparatiste née des années plus tôt. Et depuis, le conflit entre le BRN, groupe armé séparatiste, et l’armée thaïlandaise a fait plus de 7 600 morts et 14 000 blessés, des civils pour la plupart.
Le nombre de victimes tend à diminuer depuis 2013, quand des pourparlers de paix ont débuté entre les insurgés et le gouvernement thaïlandais, sous l’égide de la Malaisie.
Un processus de paix au point mort
Pour les ONG et les militants pacifiques du Sud thaïlandais, le processus de paix au point mort explique cette nouvelle poussée de violence.
Anchana Heemina, directrice d'une association qui œuvre pour la paix, est très inquiète : « Des choses terribles risquent de se produire encore et encore, car il n’y a pas de progrès du côté du gouvernement. Les autorités thaïlandaises devraient faire preuve de volonté politique dans l’avancement des négociations pour la paix ».
En décembre dernier, le groupe rebelle avait mis en garde contre le risque d’une aggravation de la violence si Bangkok ne faisait pas preuve de sérieux dans la recherche de résolution du conflit.
L’actuel gouvernement de la Première ministre Paetongtarn Shinawatra n’a toujours pas nommé d’équipe chargée de revenir à la table de négociations.
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