Le Bhoutan lève des fonds pour sa «ville de pleine conscience»
Manage episode 450121043 series 3612163
Le Bhoutan, petit royaume enclavé entre l’Inde et la Chine, au cœur de l’Himalaya est mondialement connu pour son Bonheur Intérieur Brut – un indicateur inscrit dans la Constitution, utilisé par Thimphou pour mesurer le bien-être de sa population. Ce que l’on sait moins, c’est que le Bhoutan développe un autre projet inédit : la construction d’une GMC (acronyme de la Gelephu Mindfulness City), une « ville de pleine conscience ». Et le royaume vient de lancer un appel de fonds auprès d'investisseurs étrangers.
La « ville de pleine conscience » est une ville inspirée de l'héritage spirituel bouddhiste. On prévoit d'y construire des centres de bien-être dédiés notamment à la méditation et à l'art de cultiver le moment présent. La ville compte attirer aussi des entreprises « conscientes » et « durables », selon les éléments de langage, c'est-à-dire qui seront en mesure de respecter le mode de vie bhoutanais, en adhérant au développement durable et équitable. Seront privilégiées les entreprises axées sur les biosciences, l'éducation et les projets énergétiques.
À écouter aussiBonheur National Brut, l'heure du bilan au Bhoutan
En attendant qu’il soit sorti de terre, à priori dans une vingtaine d’années, quel visage aura ce nouveau centre urbain ?
D’après les plans révélés en décembre dernier par le roi Jigme, la ville s’étendra sur 2 500 km², non loin de la ville de Gelephu près de la frontière indienne. Le Bhoutan est, au moins depuis les années 70, très attaché à la protection de sa riche biodiversité et de son environnement (composé à 70 % de forêt) et cherche depuis de nouveaux modèles qui allient développement économique, protection de l’environnement et bien-être de la population. La ville de pleine conscience a été précisément conçue dans cet objectif.
Le projet ambitionne d'attirer 150 000 personnes dans les sept à dix prochaines années et jusqu’à 1 million une fois les travaux terminés. On y trouvera donc un aéroport international (déjà en phase de construction), des liaisons ferroviaires, un barrage hydroélectrique, une université. La marche et le vélo seront privilégiés pour réduire les émissions de gaz à effet de serre. On y développera des activités communautaires et l’écotourisme. Tout le projet a été pensé dans un cadre harmonieux intégrant des quartiers résidentiels au milieu d’une faune et d’une flore protégées. On fera en sorte, par exemple, de ne pas perturber les voies migratoires des éléphants. Autre particularité de la future ville : elle fera partie d’une région administrative spéciale, c’est-à-dire qu’elle aura ses propres règles et lois.
Quels seront les potentiels obstacles à la réalisation du projet ?
L’une des priorités de cette ville du futur sera de devenir un poumon économique durable et un pont interconnecté de développement entre l’Asie du Sud et l’Asie du Sud-Est. Mais ce qui risque de freiner le projet, c’est la géographie du Bhoutan. Car, pour relier la future ville au reste du monde et ainsi renforcer les connexions régionales – un aéroport ne suffira pas –, il faudra construire de nouvelles routes et des voies ferrées jusqu’à la frontière avec l’Inde. New Delhi s'est dit prêt à aider son partenaire financièrement. Enfin, on peut se demander si le Bhoutan réussira avec ce nouveau modèle urbain à infléchir une tendance inquiétante, l’exode massif, surtout vers l’Australie, de ses jeunes qui peinent à trouver du travail. Un chiffre : plus de 60 000 Bhoutanais ont quitté le pays depuis la fin de la pandémie de Covid.
25 episodes