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Le pape François dans l’Orient compliqué / La justice en procès / n°184 (14 mars 2021)

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LE PAPE FRANÇOIS DANS L’ORIENT COMPLIQUÉ

Après 15 mois d'interruption, le pape François a repris ses voyages apostoliques en se rendant en Irak du 5 au 8 mars, en dépit des risques sanitaires et sécuritaires. Chargée de symboles, de Bagdad à Erbil, en passant par Nadjaf et Karakoch, la visite de François, visait à la fois à soutenir les chrétiens d'Orient martyrisés, renouer les liens avec l'islam chiite et donner au pays l'occasion de montrer un autre visage que celui du terrorisme. Pays à majorité musulmane chiite, l’Irak est considéré comme un des berceaux du christianisme. De nombreux chrétiens ont pris la route de l'exil pour échapper aux persécutions de Daech, et peu sont revenus. Ils étaient 1.500.000 en 2003, avant l'invasion américaine ; ils ne sont plus que 200 à 400 000, selon les estimations les plus optimistes, soit environ 1% d’une population de 39 millions d'Irakiens. Le pape François les a encouragés à prendre une part active à la reconstruction du pays. Aucun chef de l'Église catholique n'avait jamais foulé le sol de l'Irak.

Ce voyage a eu également une forte connotation interreligieuse. Il a été lecouronnement de plusieurs colloques organisés entre religieux catholiques et chiites depuis 2015, successivement au Vatican, à Paris et à Nadjaf. Depuis le début de son pontificat, les pays musulmans visités par François étaient tous à dominante sunnite (Turquie, Maroc, Égypte et Abou Dhabi). Son déplacement en Irak visait à rétablir l'équilibre vers le chiisme. Des membres de lacommunauté sunnite, qui constitue à ce jour 20 % des Irakiens - mais qui agouverné l’Irak jusqu'à l'invasion américaine de 2003 – en ont pris ombrage etreproché au pape de pas avoir rencontré individuellement un dignitaire musulman sunnite, alors que le Vatican a négocié pendant plusieurs mois la rencontre désormais historique avec le grand ayatollah Ali Al Sistani, grande figure de l'islam chiite. Le Premier ministre irakien chiite, Moustafa Al Kazimi, a annoncé que le 6 mars serait désormais en Irak la « journée nationale de la tolérance et de la coexistence », pour marquer aussi bien cette rencontre, que la rencontre interreligieuse dans la plaine d'Ur, berceau selon la tradition d’Abraham, considéré comme le père des trois monothéismes. Le pape Françoisy a présidé une rencontre interreligieuse, en l’absence toutefois des juifs qui ne seraient plus que huit à Bagdad. Avant la Seconde Guerre mondiale, les juifs formaient pourtant une communauté de poids en Irak : selon le recensement ottoman, ils composaient 40 % de la population de la capitale irakienne.

***

LA JUSTICE EN PROCÈS

Le 1er mars, le tribunal correctionnel de Paris a condamné Nicolas Sarkozy à trois ans d'emprisonnement, dont un ferme, pour corruption et trafic d'influence dans « l'affaire des écoutes ». L'ancien chef de l'État, qui a fait appeldu jugement, se dit prêt à attaquer la France devant la Cour européenne des droits de l'homme. Tout en volant au secours de l'ancien président, les responsables du parti Les Républicains ont agité le spectre d'un « gouvernement des juges », d'une « politisation de la justice », croyant déceler un agenda politique derrière cette condamnation. Selon Liora Israël, directrice d'études à l'Ecole des Hautes Etudes en Sciences Sociales de Paris et sociologue du droit de la justice, à travers ces attaques, « ce n'est pas l'indépendance de la justice qui est remise en cause, mais bien la séparation des pouvoirs ». Le Syndicat de la Magistrature (classé à gauche) s'est alarmé « que l'institution judiciaire soit attaquée et abîmée simplement parce qu'elle a rendu justice » et réclame que le ministre de la Justice et le président de la République interviennent « pour la protéger et faire en sorte qu'elle continue à officier sereinement, y compris lorsque la délinquance élitaire est visée ».

Accusé ici de sévérité et/ou de partialité, la justice l’est ailleurs de laxisme. Les récentes émeutes urbaines, les luttes entre bandes, les agressions contre la police et les policiers sont évoquées comme autant de charges contre la lenteur et l’insuffisance de la réponse pénale.

Dans une étude publiée en avril 2019, l’observatoire national de la délinquance notait l’insatisfaction de deux sur trois des personnes interrogées quant à l’action de la Justice et des tribunaux. Le reproche le plus médiatisé porte sur le laxisme de l’institution et s’articule avec un appel à davantage de sévérité et à une critique de l’insuffisance des moyens. Toutefois, les déplorations de l’insuffisante durée des peines ou de leur inexécution ne doivent pas faire oublier d’autres dénonciations : celle d’une justice de classe, à la fois inégale et inéquitable, qui réserve les longues peines d’emprisonnement aux classes populaires, mais aussi une critique que les auteurs de cette étude appellent humaniste, qui déplore que la Justice n’œuvre pas en faveur de la réinsertion des délinquants.

Le 4 mars, le garde des sceaux a lancé son avant-projet de loi destiné à « restaurer la confiance » dans la justice.

Chaque semaine, Philippe Meyer anime une conversation d’analyse politique, argumentée et courtoise, sur des thèmes nationaux et internationaux liés à l’actualité. Pour en savoir plus : www.lenouvelespritpublic.fr

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Après 15 mois d'interruption, le pape François a repris ses voyages apostoliques en se rendant en Irak du 5 au 8 mars, en dépit des risques sanitaires et sécuritaires. Chargée de symboles, de Bagdad à Erbil, en passant par Nadjaf et Karakoch, la visite de François, visait à la fois à soutenir les chrétiens d'Orient martyrisés, renouer les liens avec l'islam chiite et donner au pays l'occasion de montrer un autre visage que celui du terrorisme. Pays à majorité musulmane chiite, l’Irak est considéré comme un des berceaux du christianisme. De nombreux chrétiens ont pris la route de l'exil pour échapper aux persécutions de Daech, et peu sont revenus. Ils étaient 1.500.000 en 2003, avant l'invasion américaine ; ils ne sont plus que 200 à 400 000, selon les estimations les plus optimistes, soit environ 1% d’une population de 39 millions d'Irakiens. Le pape François les a encouragés à prendre une part active à la reconstruction du pays. Aucun chef de l'Église catholique n'avait jamais foulé le sol de l'Irak.

Ce voyage a eu également une forte connotation interreligieuse. Il a été lecouronnement de plusieurs colloques organisés entre religieux catholiques et chiites depuis 2015, successivement au Vatican, à Paris et à Nadjaf. Depuis le début de son pontificat, les pays musulmans visités par François étaient tous à dominante sunnite (Turquie, Maroc, Égypte et Abou Dhabi). Son déplacement en Irak visait à rétablir l'équilibre vers le chiisme. Des membres de lacommunauté sunnite, qui constitue à ce jour 20 % des Irakiens - mais qui agouverné l’Irak jusqu'à l'invasion américaine de 2003 – en ont pris ombrage etreproché au pape de pas avoir rencontré individuellement un dignitaire musulman sunnite, alors que le Vatican a négocié pendant plusieurs mois la rencontre désormais historique avec le grand ayatollah Ali Al Sistani, grande figure de l'islam chiite. Le Premier ministre irakien chiite, Moustafa Al Kazimi, a annoncé que le 6 mars serait désormais en Irak la « journée nationale de la tolérance et de la coexistence », pour marquer aussi bien cette rencontre, que la rencontre interreligieuse dans la plaine d'Ur, berceau selon la tradition d’Abraham, considéré comme le père des trois monothéismes. Le pape Françoisy a présidé une rencontre interreligieuse, en l’absence toutefois des juifs qui ne seraient plus que huit à Bagdad. Avant la Seconde Guerre mondiale, les juifs formaient pourtant une communauté de poids en Irak : selon le recensement ottoman, ils composaient 40 % de la population de la capitale irakienne.

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LA JUSTICE EN PROCÈS

Le 1er mars, le tribunal correctionnel de Paris a condamné Nicolas Sarkozy à trois ans d'emprisonnement, dont un ferme, pour corruption et trafic d'influence dans « l'affaire des écoutes ». L'ancien chef de l'État, qui a fait appeldu jugement, se dit prêt à attaquer la France devant la Cour européenne des droits de l'homme. Tout en volant au secours de l'ancien président, les responsables du parti Les Républicains ont agité le spectre d'un « gouvernement des juges », d'une « politisation de la justice », croyant déceler un agenda politique derrière cette condamnation. Selon Liora Israël, directrice d'études à l'Ecole des Hautes Etudes en Sciences Sociales de Paris et sociologue du droit de la justice, à travers ces attaques, « ce n'est pas l'indépendance de la justice qui est remise en cause, mais bien la séparation des pouvoirs ». Le Syndicat de la Magistrature (classé à gauche) s'est alarmé « que l'institution judiciaire soit attaquée et abîmée simplement parce qu'elle a rendu justice » et réclame que le ministre de la Justice et le président de la République interviennent « pour la protéger et faire en sorte qu'elle continue à officier sereinement, y compris lorsque la délinquance élitaire est visée ».

Accusé ici de sévérité et/ou de partialité, la justice l’est ailleurs de laxisme. Les récentes émeutes urbaines, les luttes entre bandes, les agressions contre la police et les policiers sont évoquées comme autant de charges contre la lenteur et l’insuffisance de la réponse pénale.

Dans une étude publiée en avril 2019, l’observatoire national de la délinquance notait l’insatisfaction de deux sur trois des personnes interrogées quant à l’action de la Justice et des tribunaux. Le reproche le plus médiatisé porte sur le laxisme de l’institution et s’articule avec un appel à davantage de sévérité et à une critique de l’insuffisance des moyens. Toutefois, les déplorations de l’insuffisante durée des peines ou de leur inexécution ne doivent pas faire oublier d’autres dénonciations : celle d’une justice de classe, à la fois inégale et inéquitable, qui réserve les longues peines d’emprisonnement aux classes populaires, mais aussi une critique que les auteurs de cette étude appellent humaniste, qui déplore que la Justice n’œuvre pas en faveur de la réinsertion des délinquants.

Le 4 mars, le garde des sceaux a lancé son avant-projet de loi destiné à « restaurer la confiance » dans la justice.

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