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« Tiens bon ! » aimait-il répéter aux plus jeunes, comme pour rassurer quant à l'issue heureuse de la lutte que mènent les peuples africains pour améliorer leur destin. Jean-Pierre Ndiaye n'est plus. Mais, plus que jamais, cette « certitude d’espérance » doit être entretenue.

Depuis l’annonce de sa disparition, ce 1er novembre 2022, c’est un torrent d’hommages qui salue la mémoire du Sénégalais Jean-Pierre Ndiaye. Qui était donc cet intellectuel, qui semble faire l’unanimité des éloges ? A-t-il réellement marqué des dizaines de millions d’Africains, depuis les années 1960 ?

Jean-Pierre Ndiaye était, en effet, un esprit vif. Une belle plume. Belle et surtout puissante, qui transmettait des vibrations propres à vous ébranler, à vous stimuler. Sociologue, devenu célèbre par les textes qu’il signait dans Jeune Afrique, il ne se complaisait guère dans la vanité des titres. Il avait cette liberté de ton propre à ceux qui ne recherchent rien pour eux-mêmes, n’attendent rien de personne, et peuvent donc s’offrir le luxe de déplaire.

Là où tant d’intellectuels africains, au nom de leur carrière et de leur réussite sociale, finissent par se perdre dans des concessions affligeantes, ou même dans des compromissions, Jean-Pierre Ndiaye vivait en harmonie avec ses convictions. Il était d’une intégrité qui confinait à l’oubli de soi. De cette liberté, il a payé le prix, jusqu’au bout ! Pour s’offrir un tel luxe, il avait, à ses côtés, une dame d’une sérénité immuable, enseignante, compagne d’une vie consacrée à veiller sur le destin de l’Afrique : Madeleine, « sa » Mady !

En quoi pouvait donc consister, concrètement, cette vie consacrée à veiller sur le destin de l’Afrique ?

Il proposait, sur les questions essentielles qui interpelaient l’Afrique, une réflexion incisive. Il n’est pas un défi à relever par les peuples africains, sur lequel Jean-Pierre Ndiaye n’ait réfléchi ou écrit. Il se préoccupait tout particulièrement du destin de l’homme noir, d’où qu’il vienne, où qu’il vive. Lorsqu’en 1973, il interpelle Léopold Sédar Senghor, c’est d’abord sur la nécessité d’un soutien à la minorité noire du Sud-Soudan, « méconnue de l’intelligentsia et de l’opinion africaine », disait-il. Des échanges épistolaires à la fois tranchants et feutrés, dont Senghor ne s’offusquera guère. Mieux, il invite son jeune compatriote à l’accompagner dans nombre de ses voyages, notamment dans des sommets panafricains, pour que Jean-Pierre Ndiaye constate par lui-même les efforts des dirigeants pour résoudre les crises sur lesquelles lui les jugeait défaillants.

Né au Sénégal, il a grandi en Guinée, mais, c’est en passager clandestin qu’il arrive à Bordeaux, en 1952, sur un bateau chargé de tirailleurs sénégalais à destination de l’Indochine. Jean-Pierre Ndiaye échoue dans un milieu d’enseignants, républicains « exilés » de la guerre d’Espagne, qui lui inoculent la passion de la politique. Puis il s’inscrit en sociologie, et suit assidument les cours du père dominicain Louis-Joseph Lebret, économiste.

Sa vie, dit-on, a été faite de belles rencontres. Quelques exemples ?

Alioune Diop, le fondateur des éditions Présence africaine, le nourrit de ses conseils. La vocation de Jean-Pierre Ndiaye est claire : penser l’Afrique. Il fonde donc le Bureau d’études des réalités africaines (Béra), qui publie la toute première enquête sur les étudiants noirs en France. En 1963, il est invité à donner quelques cours dans deux prestigieuses universités américaines : Georgetown, fondée par les jésuites, à Washington D.C., et UCLA (Unià Los Angeles). Il est accueilli par l’immense Dizzy Gillespie, va à Harlem rencontrer Malcom X. En France, il fréquente l’intelligentsia de gauche, dont un certain Jean-Paul Sartre.

De ces très belles rencontres, ses lecteurs ont eu leur part. À ceux qui n’ont pas eu cette chance, il reste Afrique, passion et résistance, un ouvrage à l’initiative de sa fille, Shuana, qui rassemble l’essentiel de ses meilleurs textes. En plongeant dans ces quelque 530 pages, l’on se demande parfois si ce n’est pas par choix que tant de peuples croupissent encore dans le sous-développement, préférant se mentir, à coups de slogans ronflants sur l’émergence.

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Depuis l’annonce de sa disparition, ce 1er novembre 2022, c’est un torrent d’hommages qui salue la mémoire du Sénégalais Jean-Pierre Ndiaye. Qui était donc cet intellectuel, qui semble faire l’unanimité des éloges ? A-t-il réellement marqué des dizaines de millions d’Africains, depuis les années 1960 ?

Jean-Pierre Ndiaye était, en effet, un esprit vif. Une belle plume. Belle et surtout puissante, qui transmettait des vibrations propres à vous ébranler, à vous stimuler. Sociologue, devenu célèbre par les textes qu’il signait dans Jeune Afrique, il ne se complaisait guère dans la vanité des titres. Il avait cette liberté de ton propre à ceux qui ne recherchent rien pour eux-mêmes, n’attendent rien de personne, et peuvent donc s’offrir le luxe de déplaire.

Là où tant d’intellectuels africains, au nom de leur carrière et de leur réussite sociale, finissent par se perdre dans des concessions affligeantes, ou même dans des compromissions, Jean-Pierre Ndiaye vivait en harmonie avec ses convictions. Il était d’une intégrité qui confinait à l’oubli de soi. De cette liberté, il a payé le prix, jusqu’au bout ! Pour s’offrir un tel luxe, il avait, à ses côtés, une dame d’une sérénité immuable, enseignante, compagne d’une vie consacrée à veiller sur le destin de l’Afrique : Madeleine, « sa » Mady !

En quoi pouvait donc consister, concrètement, cette vie consacrée à veiller sur le destin de l’Afrique ?

Il proposait, sur les questions essentielles qui interpelaient l’Afrique, une réflexion incisive. Il n’est pas un défi à relever par les peuples africains, sur lequel Jean-Pierre Ndiaye n’ait réfléchi ou écrit. Il se préoccupait tout particulièrement du destin de l’homme noir, d’où qu’il vienne, où qu’il vive. Lorsqu’en 1973, il interpelle Léopold Sédar Senghor, c’est d’abord sur la nécessité d’un soutien à la minorité noire du Sud-Soudan, « méconnue de l’intelligentsia et de l’opinion africaine », disait-il. Des échanges épistolaires à la fois tranchants et feutrés, dont Senghor ne s’offusquera guère. Mieux, il invite son jeune compatriote à l’accompagner dans nombre de ses voyages, notamment dans des sommets panafricains, pour que Jean-Pierre Ndiaye constate par lui-même les efforts des dirigeants pour résoudre les crises sur lesquelles lui les jugeait défaillants.

Né au Sénégal, il a grandi en Guinée, mais, c’est en passager clandestin qu’il arrive à Bordeaux, en 1952, sur un bateau chargé de tirailleurs sénégalais à destination de l’Indochine. Jean-Pierre Ndiaye échoue dans un milieu d’enseignants, républicains « exilés » de la guerre d’Espagne, qui lui inoculent la passion de la politique. Puis il s’inscrit en sociologie, et suit assidument les cours du père dominicain Louis-Joseph Lebret, économiste.

Sa vie, dit-on, a été faite de belles rencontres. Quelques exemples ?

Alioune Diop, le fondateur des éditions Présence africaine, le nourrit de ses conseils. La vocation de Jean-Pierre Ndiaye est claire : penser l’Afrique. Il fonde donc le Bureau d’études des réalités africaines (Béra), qui publie la toute première enquête sur les étudiants noirs en France. En 1963, il est invité à donner quelques cours dans deux prestigieuses universités américaines : Georgetown, fondée par les jésuites, à Washington D.C., et UCLA (Unià Los Angeles). Il est accueilli par l’immense Dizzy Gillespie, va à Harlem rencontrer Malcom X. En France, il fréquente l’intelligentsia de gauche, dont un certain Jean-Paul Sartre.

De ces très belles rencontres, ses lecteurs ont eu leur part. À ceux qui n’ont pas eu cette chance, il reste Afrique, passion et résistance, un ouvrage à l’initiative de sa fille, Shuana, qui rassemble l’essentiel de ses meilleurs textes. En plongeant dans ces quelque 530 pages, l’on se demande parfois si ce n’est pas par choix que tant de peuples croupissent encore dans le sous-développement, préférant se mentir, à coups de slogans ronflants sur l’émergence.

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