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Libye: la crise à la tête de la banque centrale plonge le pays dans l'incertitude
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La lutte de pouvoir entre les gouvernements de l'Est et de l'Ouest pour mettre la main sur la Banque centrale libyenne plonge davantage l'économie du pays dans l'incertitude. Face au risque imminent de pénuries de produits de première nécessité, une mission de l'ONU est à Tripoli pour trouver des solutions.
C'était le 26 août dernier. Des miliciens se rendent au siège de la banque centrale à Tripoli et chasse le gouverneur Sadiq Al Kabir, qui préfèrera fuir en Turquie. Ce dernier est jugé trop proche du maréchal Haftar qui contrôle l'est libyen. Abdelhamid Ddeibah, le Premier ministre de l'Ouest, a donc décidé unilatéralement de le remplacer par Abdel Fatta Ghaffar. Problème : ce gouverneur par intérim n'est pas reconnu par la communauté internationale.
Importations bloquées
Les banques américaines, britanniques et européennes ont, dans la foulée, décidé de stopper les transactions commerciales. « Ces banques-là ne sont pas idiotes. Elles savent très bien que le gouverneur intérimaire a été instauré de manière unilatérale via un coup et par la violence, décrypte Jallil Harchaoui, chercheur au Royal United Services Institute de Londres, spécialiste de la Libye. Celui qui est présenté par le Premier ministre Ddeibah comme étant le nouveau gouverneur intérimaire de la Banque centrale, en réalité, ne l'est pas. Il a pris le contrôle des systèmes de dinar en Libye, mais non pas la chose qui vraiment importe beaucoup : le nerf de la guerre, si vous voulez, ce sont les dollars. Il n'a pas la possibilité d'avoir accès à cet argent-là qui appartient à la nation libyenne ».
Les lettres de crédit comme les réserves libyennes à l'étranger sont des outils financiers qui ne peuvent pas être utilisés par ce nouveau gouverneur. Des pénuries sont à craindre à très court terme. « Personne ne peut dire comment la Libye importera les produits de première nécessitée en octobre », estime Jallil Harchaoui.
Développement de la contrebande
Un constat partagé par Majid Bouden, avocat en droit international à Paris : « L'importation vers la Libye est bloquée et donc il va y avoir pénurie sur le marché si la communauté internationale n'agit pas rapidement pour régler ce problème. Elle doit réorganiser le schéma tel qu'il fonctionnait avec les ressources qui viennent des champs pétrolifères qui passent par la NOC (la National Oil Company), puis qui sont injectées à la Banque centrale, laquelle les utilise pour financer l'économie, mais aussi payer fonctionnaires à l'ouest et à l'est. »
Cette déstabilisation profite à certains pays, selon Majid Bouden. La Russie, principal bénéficiaire du pétrole de contrebande libyen, mais aussi la Chine ou l’Iran se présentent comme des recours sur un marché parallèle en cas de pénurie. « Les produits de consommation vont être substitués, via cette manne de contrebande pétrolière, par d'autres produits, poursuit l’avocat, par exemple, on peut substituer des fournisseurs de tel ou tel produit venant d'Europe par des fournisseurs russes, chinois ou même turc. Donc c'est un problème géostratégique qu'il faut régler. C'est un problème d'urgence absolue. »
D'autant que la production de pétrole, première source de revenus de la Libye, est à l'arrêt. Une suspension décidée par le clan de Khalifa Haftar qui détient les principaux puits et qui dénonce la prise de pouvoir de l'Ouest à la tête de la banque centrale.
À écouter aussiLibye: la reconstruction de Derna s'opère «dans l'opacité totale sur l'origine des fonds», note Virginie Collombier
313 episodes
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La lutte de pouvoir entre les gouvernements de l'Est et de l'Ouest pour mettre la main sur la Banque centrale libyenne plonge davantage l'économie du pays dans l'incertitude. Face au risque imminent de pénuries de produits de première nécessité, une mission de l'ONU est à Tripoli pour trouver des solutions.
C'était le 26 août dernier. Des miliciens se rendent au siège de la banque centrale à Tripoli et chasse le gouverneur Sadiq Al Kabir, qui préfèrera fuir en Turquie. Ce dernier est jugé trop proche du maréchal Haftar qui contrôle l'est libyen. Abdelhamid Ddeibah, le Premier ministre de l'Ouest, a donc décidé unilatéralement de le remplacer par Abdel Fatta Ghaffar. Problème : ce gouverneur par intérim n'est pas reconnu par la communauté internationale.
Importations bloquées
Les banques américaines, britanniques et européennes ont, dans la foulée, décidé de stopper les transactions commerciales. « Ces banques-là ne sont pas idiotes. Elles savent très bien que le gouverneur intérimaire a été instauré de manière unilatérale via un coup et par la violence, décrypte Jallil Harchaoui, chercheur au Royal United Services Institute de Londres, spécialiste de la Libye. Celui qui est présenté par le Premier ministre Ddeibah comme étant le nouveau gouverneur intérimaire de la Banque centrale, en réalité, ne l'est pas. Il a pris le contrôle des systèmes de dinar en Libye, mais non pas la chose qui vraiment importe beaucoup : le nerf de la guerre, si vous voulez, ce sont les dollars. Il n'a pas la possibilité d'avoir accès à cet argent-là qui appartient à la nation libyenne ».
Les lettres de crédit comme les réserves libyennes à l'étranger sont des outils financiers qui ne peuvent pas être utilisés par ce nouveau gouverneur. Des pénuries sont à craindre à très court terme. « Personne ne peut dire comment la Libye importera les produits de première nécessitée en octobre », estime Jallil Harchaoui.
Développement de la contrebande
Un constat partagé par Majid Bouden, avocat en droit international à Paris : « L'importation vers la Libye est bloquée et donc il va y avoir pénurie sur le marché si la communauté internationale n'agit pas rapidement pour régler ce problème. Elle doit réorganiser le schéma tel qu'il fonctionnait avec les ressources qui viennent des champs pétrolifères qui passent par la NOC (la National Oil Company), puis qui sont injectées à la Banque centrale, laquelle les utilise pour financer l'économie, mais aussi payer fonctionnaires à l'ouest et à l'est. »
Cette déstabilisation profite à certains pays, selon Majid Bouden. La Russie, principal bénéficiaire du pétrole de contrebande libyen, mais aussi la Chine ou l’Iran se présentent comme des recours sur un marché parallèle en cas de pénurie. « Les produits de consommation vont être substitués, via cette manne de contrebande pétrolière, par d'autres produits, poursuit l’avocat, par exemple, on peut substituer des fournisseurs de tel ou tel produit venant d'Europe par des fournisseurs russes, chinois ou même turc. Donc c'est un problème géostratégique qu'il faut régler. C'est un problème d'urgence absolue. »
D'autant que la production de pétrole, première source de revenus de la Libye, est à l'arrêt. Une suspension décidée par le clan de Khalifa Haftar qui détient les principaux puits et qui dénonce la prise de pouvoir de l'Ouest à la tête de la banque centrale.
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